L’importance de la formation : voici pourquoi l’apprentissage tout au long de la vie est si capital pour sa carrière

L’automatisation et l’intelligence artificielle entraînent une énorme restructuration des compétences nécessaires dans le milieu professionnel. Nous sommes en effet au cœur d’une transformation structurelle profonde, mais avons-nous déjà pris conscience de ce qu’elle signifie réellement? Voici un plaidoyer pour la formation tout au long de la vie.

Auteur Nathalie Riffard
Date 30.07.2020
Temps de lecture 9 Minutes

« Tout ce que nous avons appris sur l’informatique pendant la crise du coronavirus sera probablement déjà obsolète dans 18 mois, ce qui équivaut environ à la demi-vie du savoir dans le domaine de l’informatique » explique Christoph Niewerth dans une interview avec le Manager Magazin. Les propos du directeur de l’agence de recrutement Hays sont encore très généreux. En 2002 déjà, l’institut Fraunhofer estimait que cette demi-vie était probablement d’une année et exhortait dans le même temps les entreprises à investir dans la formation continue de leurs collaborateurs au lieu de se concentrer sur le recrutement de main d’œuvre étrangère.

Ce même paradigme est aujourd’hui d’autant plus vrai qu’il l’était autrefois. Cependant cette prise de conscience fait défaut un peu partout. Mais d’après Niewerth, elle serait l’étape la plus importante : ce sont les entreprises comme leurs collaborateurs qui doivent tout d’abord se rendre compte de ce que signifie le concept d’apprentissage tout au long de la vie. Les travailleurs devraient en effet comprendre qu’ils ne peuvent pas concevoir leur carrière uniquement en se reposant sur les compétences qu’ils possèdent actuellement.

La transformation structurelle favorise les personnes hautement qualifiées.

Dans la NZZ, Peter A. Fischer expose une vision beaucoup plus drastique de la problématique de la transformation structurelle induite par l’automatisation et l’intelligence artificielle: « L’insécurité de l’emploi dépendra dans quelle mesure l’éducation et la formation continue permettra aux employés de s’adapter à des conditions en perpétuelle évolution ».

Il est vrai que plus on augmente sa propre formation professionnelle et donc ses domaines de compétences, plus on réduit la probabilité de voir son domaine d’activité automatisé. Mais observons plus en détail ce changement structurel et les compétences qui seront recherchées à l’avenir.

Probabilité d’automatisation et croissance de l’emploi de 2015 à 2025

Probabilité d’automatisation (à gauche)

Croissance moyenne de l’emploi par an (2015-2025) (en bas)

De gauche à droite et de haut en bas : employés de bureau et métiers apparentés, métiers manuels et métiers apparentés, métiers des services et de la vente, main d’œuvre auxiliaire, techniciens et métiers équivalents, professionnels du secteur agricole, opérateurs d’installations et de machines, cadres, professions académiques.

Source : Frey et Osborne (2013), Cedefop, Deloitte

 

Une étude de Deloitte estime que la moitié des emplois d’aujourd’hui est en principe automatisable. Ce n’est cependant pas une raison pour voir l’avenir du marché du travail suisse d’un œil pessimiste. En effet, presque tous les experts sont d’accord sur un point: la technologie ne substitue pas fondamentalement le travail mais elle déplace les domaines d’activité.

Une analyse d’economiesuisse qui prend en compte la transformation structurelle en Suisse ces 25 dernières années a par exemple permis de constater que 1’217 places de travail étaient supprimées quotidiennement en 2016 contre 1’331 créées. Le plus remarquable est que ce sont justement les secteurs dans lesquels le plus d’emplois sont rayés que le plus de nouveaux postes sont créés. Ainsi, le secteur de la santé a certes supprimé 20’000 postes, mais en a également créé 30’000.

Les compétences du futur : que devons-nous apprendre pour s’adapter à l’avenir ?

Ici, la tendance de la réorientation au sein des entreprises comme de manière globale se confirme. Les entreprises n’étant plus compétitives font place à de nouvelles entreprises. De nombreux emplois disparaissent alors que de nouveaux domaines d’activité émergent. Les maisons de presse, par exemple, qui n’ont depuis longtemps plus de secrétaires qui tapent des textes, ont vu des analystes de données et des spécialistes vidéo installer leur bureau aux côtés des journalistes.

Dans un document de travail de 2018, le McKinskey Global Institute a démontré comment l’intelligence artificielle et l’automatisation ont changé la demande en compétences des collaborateurs et apporte une première réponse à la question qui brûle les lèvres : que devons-nous savoir et apprendre afin d’être bien armé pour notre futur professionnel ?

  • Le besoin en compétences technologiques connaîtra, avec 55%, la plus grande croissance : aussi bien des compétences numériques fondamentales que des compétences avancées en technologies seront particulièrement demandées. Jusqu’en 2030, elles devraient représenter 17% du travail effectué.
  • Les compétences sociales et émotionnelles comme la direction et la gestion d’autres collaborateurs devraient augmenter de 24% pour représenter 22% du temps de travail total fourni. La demande en hautes compétences cognitives devrait dans l’ensemble connaître une croissance modérée. Ce sont surtout les compétences précises comme en particulier la créativité qui connaîtront une ascension rapide.
  • En revanche, les compétences cognitives plus fondamentales, comme la saisie et le traitement de données, devraient connaître une décroissance de 15% pour passer de 18% à 14% des heures de travail effectives.
  • La demande en compétences physiques et manuelles est également en décroissance, mais devrait encore représenter, jusqu’en 2030 et avec une part de 25%, la catégorie de qualification des employés la plus importante.

Le rôle clé de l’apprentissage tout au long de la vie

Dans le contexte d’un attendu bouleversement des compétences recherchées poussé par l’automatisation et l’intelligence artificielle, le document de travail en vient à la conclusion que les entreprises qui désirent rester maîtres du changement et compétitives doivent investir dans la formation continue de leurs employés.

Pour les collaborateurs, cela signifie que la concurrence pour la main d’œuvre hautement qualifiée va s’accentuer alors que les évictions se concentreront principalement sur la main d’œuvre la moins qualifiée. Selon le McKinsey Global Institute, la large majorité des entreprises déclarent vouloir engager et reconvertir le plus possible de main d’œuvre hautement qualifiée afin que celle-ci puisse également profiter de salaires plus élevés.

La formation continue et l’apprentissage tout au long de la vie joueront donc un rôle clé dans le futur. Mais cela a un certain prix. Aussi bien pour tout un chacun que pour les entreprises. Car celui qui veut rester compétitif doit sans cesse investir dans la formation continue. Ou comme John F. Kennedy l’a jadis formulé : « Il n’y a qu’une seule chose qui soit plus couteux sur le long terme que la formation: l’absence de formation. »

 

Cet article est la première partie de notre dossier sur le thème de l’apprentissage tout au long de la vie. Nous publierons ces prochaines semaines d’autres articles sur ce sujet qui auront pour thème :

  • La signification de l’apprentissage tout au long de la vie pour sa carrière
  • L’instauration d’une culture d’entreprise autour de l’apprentissage tout au long de la vie
  • L’intégration de l’apprentissage tout au long de la vie dans son quotidien professionnel
  • L’adaptation de l’apprentissage et de la formation continue

 

Sources :

  • Arbeitspioniere: Gelebte New-Work-Konzepte (2020): Warum lebenslanges Lernen für die Karriere wichtig ist (Podcast), in: Manager Magazin, sur: manager-magazin.de
  • Deloitte (2016) : La restructuration crée des emplois. L’impact de l’automatisation sur l’emploi en Suisse, sur : www2.deloitte.com
  • Economiesuisse (2019) : Un marché de l’emploi très dynamique: si un emploi sur dix passe à la trappe, les emplois créés sont, eux, bien plus nombreux, sur: economiesuisse.ch
  • Florian Gontek: Fortbildung der Mitarbeiter. Das unterschätzte Erfolgskonzept in: Spiegel Online, 25.05.2020, sur: spiegel.de
  • McKinsey Global Institute (2018) : Skill Shift: Automation and the Future of the Workforce, sur: mckinsey.com
  • Natalie Gratwohl (2016) : Wie Roboter den Arbeitsmarkt verändern, in: NZZ, sur: nzz.ch
  • Peter A. Fischer (2019) : 1217 Stellen pro Tag gestrichen – 1331 neu geschaffen. So funktioniert der Strukturwandel, in: NZZ, sur: nzz.ch

A propos de l'auteur

Nathalie Riffard

Nathalie Riffard aime raconter de belles histoires. Pendant ses études de sociologie, de sciences politiques et de littérature déjà, elle se passionne pour la recherche et l’écriture. Elle s’épanouit ensuite dans un premier poste de rédactrice en cheffe, lors duquel elle est amenée à prendre en charge divers partenaires publicitaires et se découvre une passion pour le marketing de contenu. En tant que Certified Digital Marketing Professional et créatrice de contenus, elle travaille aujourd’hui au sein de l’équipe de marketing et communication de Digicomp.