Comment fonctionne « Click-Gap », le nouvel algorithme de Facebook ?

Des faux comptes qui s’étendent à perte de vue. Des célébrités bel et bien vivantes qui sont annoncées décédées. Des rumeurs et des ragots propagés dans des groupes privés. De la propagande politique et des campagnes de dénigrement haineuses. Tous ces éléments engendrent depuis des années de nombreuses critiques envers le réseau social Facebook. Et c’est avec « Click-Gap » que Facebook compte maintenant réagir. Roger Basler nous explique à qui cet outil profite et à qui il porte plutôt préjudice.

Auteur Roger Basler
Date 17.07.2020
Temps de lecture 14 Minutes

L’outil de statistique « Click-Gap » constitue le fondement du nouvel algorithme de Facebook. Le réseau social vise par-là à identifier les fake news et les contenus inappropriés. Mais les bloggeurs et les propriétaires de sites ne faisant pas partie du paysage médiatique traditionnel vont en faire les frais.

Comment fonctionne « Click-Gap » ?

Les « j’aime », les commentaires et les contenus partagés : ces types d’interactions ont longtemps été les seules unités de mesure des différents posts Facebook. Plus nous générions d’interactions par le biais d’un post, plus notre portée était élevée. C’était presque exclusivement le taux d’interaction généré qui définissait dans quels fils d’actualités notre contenu allait apparaitre à l’avenir. Et ce que le monde en dehors du réseau social pensait de notre article n’avait quasiment aucun impact sur notre popularité sur Facebook.

Or, le nouvel instrument de statistique « Click-Gap » vient bouleverser cette corrélation. En tant qu’élément centrale du nouvel algorithme Facebook, cet outil compare la propagation d’un contenu sur Facebook avec sa popularité en dehors du réseau. La différence entre le taux de diffusion interne et externe à Facebook détermine dès lors la portée que notre contenu atteint sur Facebook.

Ce fonctionnement repose sur un postulat : les liens utiles et les vraies informations ne sont pas uniquement partagés sur les réseaux sociaux. Et une personne voulant répandre de fausses informations ou d’autres contenus extrêmes ou douteux le fait principalement sur Facebook. En dehors du réseau, ces contenus ne se répandent que très peu. C’est pourquoi la portée interne d’un tel post ne corrèle que très rarement avec sa portée externe.

« Click-Gap » identifie ce manque de corrélation. Le nouvel algorithme veille ensuite à ce que ces posts soient également peu diffusés sur Facebook. Ainsi les articles douteux apparaissent dans relativement peu de fils d’actualités et le taux d’interaction qu’ils sont susceptibles de générer diminue. Par conséquent, la source du contenu perd en réputation sur Facebook et, automatiquement, ses futurs contenus atteindront également moins de monde.

Les articles et les liens créés pas des médias sérieux sont désormais mis en avant par « Click-Gap » grâce à leur diffusion élevée en dehors du réseau. Grâce à cela, ils domineront à l’avenir les fils d’actualité des utilisateurs de Facebook et généreront également le plus de réactions. « Click-Gap » permet aussi à Facebook de se rapprocher du fonctionnement de Google. En effet, les pages contenant le plus de liens retours (ou backlinks) reçoivent automatiquement une place privilégiée dans les résultats de recherche du géant du web.

Une vidéo de terroriste comme déclencheur

Les experts voient avant tout « Click-Gap » comme la réaction à la diffusion virale de l’attentat de Christchurch en mars 2019. L’auteur extrémiste avait filmé son acte terroriste dans deux mosquées néo-zélandaises sur son téléphone portable. Il avait partagé la vidéo sur Facebook sous forme de live-stream. Ainsi, même si moins de 200 personnes avaient assisté au massacre en direct par le biais de la vidéo de 17 minutes, plus de 4’000 utilisateurs l’avaient déjà visionnée en seulement douze minutes, avant que Facebook n’ait pu supprimer la vidéo. Une copie avait atterri sur un site de partage de fichiers, ce qui avait permis à la vidéo d’être diffusée d’avantage, même après sa suppression par Facebook. Rien que dans les premières 24 heures suivant le drame, le réseau social avait dû supprimer plus d’un million de posts en rapport avec la vidéo terroriste.

Peu après les faits, Facebook avait déjà réagi en limitant la fonction permettant la diffusion de vidéo en directe. La diffusion virale d’attaques terroristes devait ainsi être évitée à l’avenir. Les utilisateurs ayant commis des infractions sévères aux règles d’utilisation devaient dès lors se voir refuser l’accès aux diffusions en directe et à la lecture de vidéos – du moins dans un premier temps.

Parmi les infractions sévères aux règles d’utilisation, le réseau social compte entre autre les contenus extrémistes ou les liens vers des pages web au contenu extrémiste. Mais un outil approprié permettant d’identifier de tels liens manquait encore cruellement à Facebook. Les fonctionnalités de reconnaissance faciales et vidéos ne suffisaient pas à leur identification. Peu après l’attaque, lors de « l’Appel de Christchurch » à Paris, des personnalités politiques avaient déjà discuté de nouvelles directives pour les géants du web. L’instrument de statistique « Click-Gap » semble être une tentative de réponse aux exigences de nouvelles régulations.

Le nouvel outil doit être à même de reconnaitre les infractions aux règles d’utilisation telles que les liens vers des contenus extrémistes et de prendre dans la foulée des mesures de blocage. Bien que ce soit la vidéo de Christchurch qui ait attiré le plus l’attention, il ne s’agissait pas du premier scandale vidéo sur Facebook ces dernières années. Au cours de la même année, il avait même été reproché au réseau social de faire, à son insu, de la propagande par le biais de ses vidéos générées automatiquement. En effet, le réseau compile, par des procédés automatisés, des vidéos réalisées avec les contenus de ses utilisateurs. Dans le cas où ces contenus contiennent des éléments extrémistes, la vidéo en résultant devient donc de la propagande. « Click-Gap » permet donc également de répondre à ce scandale en reconnaissant beaucoup plus rapidement les posts problématiques.

Des faits plutôt que des fakes

Les contenus extrémistes sur Facebook font probablement partie des problèmes actuels les plus graves mais ne sont pas les seuls problèmes. Les fausses informations (infox ou fake news), qui sont particulièrement diffusées et partagées au sein de groupes Facebook, sont tout aussi problématiques. « Click-Gap » doit être à même de reconnaitre de telles informations. Les administrateurs de ces groupes seront alors bloqués beaucoup plus rapidement suite à une infraction des règles d’utilisation.

Avant « Click-Gap », Facebook avait déjà tenté de recruter des journalistes et des scientifiques comme experts indépendants. Ce sont eux qui devaient déclasser toute information non fiable afin d’assurer une présence majoritaire d’articles sérieux dans le fil d’actualité des utilisateurs. Cette approche louable a cependant fait l’effet d’un pétard mouillé en raison de l’aspect extrêmement chronophage de la vérification.

Le nouvel algorithme fait dès maintenant son entrée en lieu et place des experts. Les fonctions de vérification sont dès lors également planifiées pour l’application Facebook Messenger. Un symbole de coche doit à l’avenir permettre de reconnaître les médias et personnes vérifiées. À l’aide d’un bouton de contexte, les utilisateurs doivent en outre pouvoir avoir accès à la source des informations. Grâce à ces mesures, le réseau social entend s’engager concrètement contre les faux profils et, à l’avenir, les exclure beaucoup plus rapidement de la plateforme.

Bien que ces plans concernant le nouvel algorithme soient particulièrement réjouissants, il reste cependant un problème. En effet, en tant qu’instrument basé sur la statistique « Click-Gap » est certes capable de déterminer la différence de diffusion, mais évalue aussi l’authenticité de supposés faits ou personnes uniquement sur la base de probabilités. C’est pourquoi ce nouvel algorithme retravaillé de Facebook n’apporte pas que des avantages. En particulier, les pages Facebook de médias alternatifs ou de petites entreprises doivent compter sur des désavantages exacerbés.

Voici ce que signifie « Click-Gap » pour notre popularité

En ce qui concerne les articles de blog des plus petites entreprises : afin d’atteindre une portée importante en dehors des réseaux sociaux, il est impératif d’être déjà connu du grand public. Jusqu’alors les pages Facebook avaient été une aide cruciale dans l’introduction sur le marché d’un point de vue des créateurs de médias alternatifs et des plus petites entreprises. Il n’y avait pas de meilleur endroit pour assimiler autant de backlinks avec si peu d’efforts, il n’était possible nulle part ailleurs d’atteindre une portée plus importante et aucun autre media permettait d’améliorer le référencement par Google aussi facilement.

Mais maintenant, « Click-Gap » met des bâtons dans les roues lors de tels plans marketing. Alors que les entreprises établies et que les médias connus apparaissent, grâce à leurs backlinks, de manière stable dans les fils d’actualités de nombreux utilisateurs Facebook, la notation interne des articles de toutes les autres pages Facebook prennent l’eau. Parallèlement, la visibilité des utilisateurs est également sur la pente descendante. C’est la raison pour laquelle il devient de plus en plus difficile de générer des interactions avec des posts. La décroissance du taux d’interaction ne reflète plus uniquement une baisse de la qualité des articles et ne péjore plus seulement la visibilité interne au réseau. En effet, puisque les réactions sur Facebook ont un impact sur le référencement Google des sources associées, l’apparente décroissance de la réactivité d’une communauté de fans sur Facebook sera également sanctionnée par le moteur de recherche avec une baisse de l’évaluation et donc du référencement. Ainsi « Click-Gap » réduit, de bien des manières, le potentiel viral de popularité et de visibilité.

Dans ce contexte et depuis l’introduction du nouvel algorithme, il ne vaut plus que partiellement la peine d’utiliser des pages Facebook de manière professionnelle. La diversité était jusqu’alors une des grandes forces du réseau social, qui offrait également des possibilités énormes pour les plus petits distributeurs ou les médias alternatifs. Mais autant la diversité que le champ des possibles ont pris un coup et sont devenus les dommages collatéraux dans la bataille contre les fake news et les contenus inappropriés.

Les fils d’actualité de Facebook seront à l’avenir presque entièrement constitués de contenus mainstream car « Click-Gap » catégorise automatiquement les articles non issus des médias de masse comme contestable. Mais cette catégorisation n’a que très peu à voir avec la réelle qualité des posts. Afin d’identifier la véritable plus-value d’un article, il faudrait, au lieu d’un instrument de probabilité, de vrais experts en chair et en os. Mais d’après le réseau social, ces derniers ne sont pas suffisamment nombreux. Et engager des personnes en chair et en os est probablement aussi beaucoup plus coûteux qu’essayer de résoudre le problème à l’aide d’un algorithme de vérification.

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A propos de l'auteur

Roger Basler

Roger Basler est économiste d'entreprise et architecte d'entreprise. Il dirige, accompagne et investit dans des start-ups actives dans les domaines des technologies de pointe, du commerce numérique et de l'entrepreneuriat social. Ses domaines de spécialisation incluent le commerce en ligne, le commerce social, le marketing digital, le retour sur investissement sur les réseaux sociaux, le marketing classique et les startups.